Les menaces font partie dans le Code pénal des « crimes ou délits contre la liberté » et non pas, comme beaucoup pourraient le penser, des « infractions contre la vie et l’intégrité corporelle ». Du point de vue du droit pénal, une déclaration ou un acte constitue une menace lorsque la personne visée est effrayée ou alarmée. Le fait que la personne concernée ait été menacée de violences, de mort ou de toute autre nouvelle susceptible de l’effrayer ne joue aucun rôle. Le caractère punissable tient en ce que la liberté d’action de la personne visée a été limitée par la menace. Outre que les menaces sont en soi déjà punissables, la question se pose toujours de savoir si les actes annoncés ont été ou non exécutés. Il ne suffit donc pas d’agir de manière préventive contre les menaces. Le travail de prévention comprend également l’évaluation de ces dernières.

Définition et situation juridique

Dans le langage courant, le terme de menace a un sens un peu différent de celui qu’il a en droit. Dans la vie de tous les jours, « menacer » est souvent utilisé comme synonyme de « sommer », « mettre en garde » ou d’ « avertir ». La définition juridique doit être plus précise. Elle est formulée comme suit à l’art. 180 CP : « Celui qui, par une menace grave, aura alarmé ou effrayé une personne sera, sur plainte, puni d’une peine privative de liberté de trois ans au plus ou d’une peine pécuniaire. »

Il ressort donc clairement de l’article de loi que seules les « menaces graves » peuvent être punissables. Cela veut dire que la victime a été menacée d’un préjudice grave et qu’elle a cru à cette menace au point d’être mise dans un état de frayeur ou d’alarme. Le fait que l’auteur soit sérieux ou non n’importe pas pour que la menace soit punissable. Les menaces se poursuivent sur plainte. Cela signifie qu’une victime doit déposer plainte pour que les autorités pénales interviennent.

Il n’en va pas de même lorsque les menaces sont proférées lors de violence domestique. Selon l’art. 180 CP, « la poursuite aura lieu d’office : a) si l’auteur est le conjoint de la victime et que la menace a été commise durant le mariage ou dans l’année qui a suivi le divorce ; abis) si l’auteur est le partenaire de la victime et que la menace a été commise durant le partenariat enregistré ou dans l’année qui a suivi sa dissolution judiciaire ; b) si l’auteur est le partenaire hétérosexuel ou homosexuel de la victime pour autant qu’ils fassent ménage commun pour une durée indéterminée et que la menace ait été commise durant cette période ou dans l’année qui a suivi la séparation. »

Il faut remarquer en outre que la menace peut être proférée de toutes sortes de façons : par des images ou des photos, par des écrits, des coups de feu en l’air, etc. L’appréciation juridique doit toujours prendre en compte le contexte général. Et comme pour tous les éléments constitutifs d’un délit, les menaces sont également punissables si elles ont été commises en se servant des médias numériques.

Quand appeler la police et pourquoi  ?

Au quotidien, les menaces sont régulièrement proférées par petits et grands. Il n’y a qu’à s’imaginer les journées avec des enfants : les parents menacent mais les enfants se menacent aussi souvent entre eux. Et ces menaces ne sont bien sûr jamais dénoncées à la police. La raison la plus évidente, c’est que ce genre de menace ne met personne dans un état de frayeur ou d’alarme, ne serait-ce que parce que le préjudice à subir (« Pas de dessert si tu ne débarrasses pas la table ») ne pèse pas très lourd.

À l’inverse, des personnes ne doivent pas craindre d’alerter la police si elles prennent la menace au sérieux, qu’elles ont peur et que sa mise à exécution aurait de graves conséquences. La menace la plus grave est la menace de mort et elle doit dans tous les cas être dénoncée si elle est prise au sérieux. Les menaces anonymes sont particulièrement perfides. Ne connaissant pas leur auteur, les personnes visées ne peuvent clairement évaluer si elles sont sérieuses, ce qui ne fait qu’accroître la peur.

La communication de menaces par les médias numériques a notamment pour caractéristique que la distance et l’anonymat présumé incitent à la désinhibition des personnes ayant des comportements asociaux. Dans un face à face, elles manifesteraient davantage de retenue. Les menaces proférées sur Internet sont également punissables et doivent donc être dénoncées, d’autant plus que les autorités de poursuite pénale ont souvent les moyens d’identifier les auteurs et de les rappeler à l’ordre.

Dans les formes de violence les plus graves, on constate souvent après coup qu’il y avait eu des signes avant-coureurs. Selon la Police cantonale zurichoise, « il y aurait régulièrement des signes annonciateurs précédant de graves actes de violence à l’intérieur des couples ou des familles, sur le lieu de travail ou contre des représentants des autorités et des institutions […]. Toute personne qui prend conscience de tels signaux porte une part de responsabilité pour que ces actes puissent être empêchés. » Les menaces font partie de ces signes annonciateurs. Mais comment reconnaître si une menace est sérieuse, comment faire la différence entre une menace en l’air et une menace dont il faut s’inquiéter ?

Menaces réelles ou vaines  ?

Selon l’art. 180 CP, l’élément constitutif de l’infraction est rempli dès qu’il y a eu une menace, qu’elle ait été sérieuse ou non. La seule chose qui importe, c’est l’effet que la menace a eu sur la victime. En ce qui concerne l’évaluation, demeure la question centrale de savoir si la menace est à considérer comme un signal avant-coureur d’actes de violence. Il n’existe malheureusement pas de formules simples ou de check-lists qui permettent de procéder à une telle évaluation. Il est impossible de trancher de manière définitive si une menace constitue un signal avant-coureur d’actes de violence à prendre au sérieux. Il faut chaque fois considérer le contexte et les caractéristiques propres de l’auteur de la menace et sa situation personnelle.

Que fait la police  ?

Quelques cantons ont déjà mis sur pied ce que l’on appelle un dispositif (cantonal) de gestion des menaces. Une gestion des menaces sert à identifier, évaluer et désamorcer des situations de menace ou de mise en danger. Une collaboration systématique, interinstitutionnelle et professionnelle est nécessaire pour parvenir à identifier, évaluer et désamorcer ces menaces et ces risques. C’est à ce prix qu’il sera possible de collecter et d’ordonner correctement les informations nécessaires. La police joue toujours dans ces réseaux un rôle essentiel mais doit travailler idéalement de façon interdisciplinaire. L’une de ses missions est d’évaluer si une menace est sérieuse et grave. Il lui faut pour cela des connaissances, des instruments appropriés et certainement aussi des valeurs empiriques.

Ce site utilise des cookies. Pour en savoir plus sur la manière dont nous utilisons les cookies et sur la manière dont vous pouvez modifier vos paramètres, consultez notre politique de confidentialité : Déclaration de protection des données