Pornographie illégale

«E-commerce = P-commerce!» Voilà ce qu’on disait aux débuts des achats en ligne. En clair, cela signifiait que l’on trouvait avant tout de la pornographie à vendre, à acheter et à consommer. La question ici n’est pas de savoir si cette assertion est vraie ou pas. Mais il est incontestable que l’offre de pornographie a fortement augmenté avec l’arrivée d’Internet et que l’accès à celle-ci s’en est trouvé extraordinairement simplifié.

Il est donc devenu urgent de savoir ce qu’il en est de la pornographie sur le plan juridique. Car qui connaît les lois peut se protéger et protéger d’autres personnes de se rendre involontairement punissables par des actes irréfléchis. Cette connaissance du droit permet aussi d’évaluer correctement quand il est nécessaire d’appeler la police.

Définition

La perception de la pornographie varie énormément d’une personne à l’autre. Pour ce qui est de la prévention de la criminalité, c’est avant tout la définition juridique qui importe. Il faut donc s’en référer à ce que disent le Code pénal et le Tribunal fédéral.

Pornographie

Selon un arrêt du Tribunal fédéral rendu en 2005, la pornographie se définit de manière générale comme suit :

« La notion de pornographie suppose d’une part que les représentations ou les spectacles sont objectivement conçus pour provoquer chez le consommateur une excitation sexuelle. D’autre part, il est nécessaire que la sexualité soit extraite de son contexte humain et émotionnel au point que la personne concernée apparaisse comme un simple objet sexuel dont on peut disposer à volonté. Le comportement sexuel en devient grossier et mis en avant avec insistance. »

Pornographie interdite

La loi désigne deux formes de pornographie qui, d’une manière générale, sont punissables : les représentations pornographiques avec des enfants et avec des animaux.

Situation juridique

Le droit traite de la pornographie sous divers aspects. D’une part, il définit à partir de quel âge et dans quelles conditions la pornographie peut être rendue accessible à des personnes. D’autre part, il contient des dispositions qui interdisent certaines formes de pornographie. En outre, il existe des textes juridiques qui disent quelles représentations sont à considérer comme pornographiques.

Art. 197 al. 1 CP Article pour la protection de la jeunesse

« Quiconque offre, montre, rend accessibles à une personne de moins de 16 ans ou met à sa disposition des écrits, enregistrements sonores ou visuels, images ou autres objets pornographiques ou des représentations pornographiques, ou les diffuse à la radio ou à la télévision, est puni d’une peine privative de liberté de trois ans au plus ou d’une peine pécuniaire. »

Cet article qui vise à protéger la jeunesse se réfère à des personnes pouvant potentiellement proposer de la pornographie mais pas à ses consommateurs. Son objectif est d’aider à ce que les jeunes ne soient pas dérangés dans leur développement sexuel. A l’époque de la pornographie en ligne où les sollicitations viennent du monde entier avec des pays où les cadres juridiques diffèrent fortement, la protection de la jeunesse est difficile à garantir. Une information appropriée est donc d’autant plus importante.

Art. 197 al. 4 et 5 CP Pornographie illégale

Les deux alinéas de l’article 197 indiquent deux formes de pornographie qui, d’une manière générale, sont punissables : les représentations pornographiques avec des enfants et avec des animaux. Les photos d’enfants nus peuvent déjà être considérées comme pornographiques si l’impression d’ensemble qu’elles donnent témoigne d’une volonté d’exciter sexuellement la personne qui les regarde.

Art. 197 al. 8 et 8bis CP Réserve

Quiconque fabrique, possède ou consomme des objets ou des représentations au sens de l’al. 1 impliquant un mineur, ou les lui rend accessibles, n’est pas punissable :
a. si le mineur y a consenti ;
b. si la personne qui fabrique les objets ou représentations ne fournit ou ne promet pas de rémunération, et
c. si la différence d’âge entre les personnes concernées ne dépasse pas trois ans.

Quiconque, étant mineur, fabrique, possède ou consomme des objets ou des représentations au sens de l’al. 1 qui l’impliquent lui même ou les rend accessibles à une autre personne avec son consentement n’est pas punissable.
La personne à qui ces objets ou représentations sont rendus accessibles n’est pas punissable en cas de possession ou de consommation :
a. si elle ne fournit ou ne promet pas de rémunération ;
b. si les personnes concernées se connaissent personnellement, et
c. si les personnes concernées sont majeures ou, si l’une d’elles au moins est mineure, que leur différence d’âge ne dépasse pas trois ans.

Art. 197a CP : Transmission indue d’un contenu non public à caractère sexuel

Est punissable quiconque transmet à un tiers un contenu privé à caractère sexuel (image, vidéo, écrit, objet), sans le consentement de la personne qui y est identifiable. Ce délit n’est poursuivi que si la victime dépose plainte. Il s’agit donc d’un délit sur plainte.

Comportements problématiques avec la pornographie

Les jeunes et la pornographie

Plusieurs études suisses suggèrent que la plupart des jeunes de moins de 16 ans ont déjà vu des photos ou des films pornographiques. Mais seule une petite partie des jeunes manifeste un comportement problématique avec la pornographie (addiction, absence de distinction entre le monde pornographique imaginaire et la réalité, préférence pour les formes extrêmes et la pornographie illégale, etc.).

Cela dit, il faut aussi relever que jusqu’à 50 % des mineurs auteurs d’agressions sexuelles sont des consommateurs excessifs de pornographie. Ces jeunes regardent en outre très tôt de la pornographie et ont souvent une préférence pour des formes extrêmes. Ces jeunes délinquants reconnaissent fréquemment eux-mêmes que la consommation de pornographie les incite à commettre des agressions sexuelles. Mais d’autres facteurs de risques doivent encore être présents pour qu’un jeune devienne effectivement un délinquant sexuel. La consommation de pornographie n’est donc à considérer que comme un facteur de risque de développement déviant chez les jeunes.

Porno-dépendance

A notre connaissance, aucune étude représentative n’a (encore) été menée ni sur les comportements d’addiction ni sur la pornographie. Toutefois, les centres de consultation pour problèmes de dépendance rapportent que certaines personnes contrôlent difficilement ou sont même incapables de contrôler leur consommation de pornographie. Il y a addiction lorsqu’une personne, pour satisfaire un besoin, doit avoir des stimulations toujours plus fortes pour éprouver le plaisir recherché. En ce qui concerne les stimulations pornographiques, une telle addiction a pour effet que les personnes commencent à rechercher des formes illégales de pornographie et se rendent ainsi punissables.

Pédopornographie

La jurisprudence donne une définition très large de la pornographie qui met en scène des mineurs. Ainsi, toute mise en scène sexualisée ou pose suggestive peut être considérée comme pornographique. Il est ainsi tenu compte du fait que toute représentation pédopornographique établit une preuve de l’abus d’un enfant et ne constitue donc en rien un délit mineur ! Par leur consommation, les amateurs de pédopornographie soutiennent directement l’exploitation sexuelle d’enfants.

Sexting

Les échanges de type « sextoter » (aussi appelé « sexting » : le mot « sexe » remplace ici le mot « texte ») posent un problème particulier au cadre législatif qui entoure le volet « représentations sexuelles avec des enfants ou adolescents de moins de 18 ans ». Ce phénomène, qui se traduit par l’envoi de photos ou de vidéos sexy par smartphone entre jeunes amoureux soit pour témoigner de la sincérité de ses sentiments amoureux, soit pour accomplir un acte de courage, est passablement répandu. En effet, l’impossibilité de pouvoir contrôler la diffusion de toute image numérique envoyée comporte aussi le risque que celle-ci puisse être utilisée abusivement dans le temps, voire servir de moyen pour harceler. À noter qu’un problème subsiste s’agissant de la pornographie illégale évoquée ci-dessus : si l’on peut certes qualifier la photo d’une jeune de quinze ans en sous-vêtements sexy de représentation à caractère pédopornographique, il faut aussi éviter de criminaliser inutilement les personnes mineures. Ainsi, dès lors qu’elles pratiquent le sexting de manière consensuelle, la loi prévoit des dérogations. La fabrication, la possession et la consommation d’un contenu non public à caractère sexuel n’est pas punissable si les personnes concernées se connaissent personnellement, que leur différence d’âge n’excède pas trois ans, qu’elles y ont toutes consenti et qu’il n’y a ni promesse ni fourniture de rémunération; cette disposition s’applique aussi aux mineurs (art. 197, al. 8 et 8bis, CP).

Revenge porn

La porno-vengeance, ou revenge porn, désigne la diffusion ou la publication de photos ou de vidéos intimes sans le consentement de la personne qui y est identifiable. En règle générale, il s’agit d’actes commis pour humilier ou causer du tort à cette personne. Les conséquences émotionnelles, sociales et professionnelles sont souvent lourdes pour les victimes. Il s’agit, en outre, d’une forme d’abus numérique. La porno-vengeance est un délit punissable (art. 197a, al. 1 et 2, CP).

Que fait la police ? Que pouvez-vous faire ?

La pornographie illégale est un délit poursuivi d’office, ce qui signifie que la police procède automatiquement à une enquête dès le moment où elle a connaissance d’une violation du droit.

Chacun peut aussi remplir un formulaire en ligne pour signaler des contenus illégaux.

Bon nombre de photos pornographiques avec des enfants sont prises à l’étranger. Mais régulièrement figurent également des Suisses parmi les auteurs de telles infractions. Les Suisses qui abusent d’enfants à l’étranger ou y produisent de la pédopornographie peuvent aussi être poursuivis pénalement. Ce sont surtout les autorités de police et les organisations de protection de l’enfance dans les pays touristiques qui signalent les cas aux autorités pénales suisses. Mais vous pouvez vous aussi aider à lutter contre ces crimes en signalant des personnes qui pratiquent le tourisme pédosexuel.

Centres de consultation

  • Le site d’Addiction Suisse fournit des informations sur l’addiction en ligne ainsi que des adresses de centres de conseil dans votre région.
  • Les jeunes peuvent aussi se renseigner et trouver des conseils à propos de la pornographie sur le site ciao.ch.
  • Le site cybersmart fournit des informations sur le thème de la pornographie sur Internet destinées aux jeunes et aux adultes.
  • Les personnes qui ont des tendances pédophiles et qui souhaitent se faire aider avant de commettre des actes punissables peuvent consulter Dis No.

Pornographie: Agir de bon droit

Informations sur le thème de la pornographie et de son cadre réglementaire

Le fascicule «Pornographie: Agir de bon droit» fournit des renseignements sur les principaux articles de loi concernant la pornographie. Il a pour but de contribuer à ce que les jeunes apprennent à satisfaire leur curiosité et la découverte de leur sexualité de manière tout à fait légale. Le fascicule détaille la situation juridique dans le domaine et fournit aux jeunes et aux adultes des informations utiles sur l‘âge de protection, le sexting et la pornographie illégale. Quant aux parents et responsables d’éducation, il les conseille afin qu’ils maîtrisent le sujet avant de l’aborder avec les jeunes.

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